En déplacement mercredi aux États-Unis, la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen pourrait y rencontrer le président de la Chambre des représentants Kevin McCarthy. “Une provocation”, selon Pékin qui menace de “riposter”. La Chine considère l’île autonome comme une de ses provinces et au nom de son principe d'”une seule Chine”, aucun pays n’est censé entretenir de liens officiels avec Pékin et Taipei en même temps.
C’est un nouvel épisode de crispation autour de Taïwan. La Chine a promis mercredi 29 mars de “riposter” si la présidente taïwanaise rencontrait le président de la Chambre des représentants Kevin McCarthy lors d’un déplacement aux États-Unis et en Amérique centrale visant à renforcer les liens diplomatiques de l’île avec ses alliés.
La présidente Tsai Ing-wen fait étape mercredi à New York, avant de se rendre au Guatemala et au Belize, puis s’arrêtera en Californie au retour de ce voyage, où Kevin McCarthy a déclaré qu’il la rencontrerait.
Pékin a prévenu mercredi qu’il était “résolument opposé” à une telle rencontre, promettant de prendre des “mesures fermes pour riposter” si elle avait lieu.
La Chine considère l’île autonome comme une de ses provinces et entend la reprendre par la force si nécessaire. Au nom de son principe d'”une seule Chine”, aucun pays n’est censé entretenir de liens officiels avec Pékin et Taipei en même temps.
Une telle rencontre serait considérée “comme une nouvelle provocation qui violera sérieusement le principe d’une seule Chine, portera atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Chine, et compromettra la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan”, a déclaré Zhu Fenglian, porte-parole du bureau des affaires taïwanaises de Pékin.
“La pression extérieure n’entravera pas notre détermination” à être actifs sur la scène internationale, a affirmé Tsai Ing-wen avant son départ de Taïwan.
“Un prétexte pour surréagir”
Lors de ce déplacement de dix jours, Tsai Ing-wen doit rencontrer le président du Guatemala Alejandro Giammattei et le Premier ministre du Belize John Briceno.
Le Belize et le Guatemala comptent parmi les 13 derniers pays à reconnaître officiellement Taïwan au détriment de Pékin, après que le Honduras a établi dimanche des relations diplomatiques avec la Chine.
Tsai Ing-wen s’arrêtera à Los Angeles sur son trajet de retour vers Taïwan. Kevin McCarthy a déclaré qu’il la rencontrerait, ce que les autorités taïwanaises n’ont pas confirmé.
En 2022, une visite à Taïwan de la prédécesseure de Kevin McCarthy, Nancy Pelosi, avait déclenché l’ire de Pékin.
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“Il n’y a absolument aucune raison pour la Chine d’utiliser cela comme prétexte pour surréagir ou s’engager dans une coercition accrue à l’égard de Taïwan”, a déclaré mercredi un haut responsable américain.
Mais pour le ministère chinois des Affaires étrangères, Washington “est aveuglément de connivence avec Taïwan et soutient les forces indépendantistes et sécessionnistes” de l’île. La porte-parole du ministère Mao Ning a exhorté les États-Unis à cesser toute forme d’échange officiel avec Taïwan et à “cesser (…) de saper les fondements politiques des relations sino-américaines”.
Pékin a accru la pression militaire, économique et diplomatique sur l’île depuis l’arrivée au pouvoir de Tsai Ing-wen en 2016, et récupéré depuis lors neuf de ses alliés diplomatiques.
“Les tentatives de Pékin de s’emparer de partenaires diplomatiques de Taïwan conduiront Taïwan à développer des liens plus étroits avec les États-Unis”, estime James Lee, spécialiste des relations américano-taïwanaises à l’Académie Sinica, à Taïwan.
“Coercitions et intimidations” de la Chine
Washington, qui a pourtant accordé sa reconnaissance diplomatique à Pékin en 1979, est l’allié le plus puissant de l’île ainsi que son principal fournisseur d’armes.
Selon James Lee, “la perte de relations officielles avec des pays tiers sera compensée par l’approfondissement des relations non officielles de Taïwan”.
Un des principaux opposants de Tsai Ing-wen à Taïwan, l’ex-président Ma Ying-jeou, se trouvait en Chine mercredi, où il a appelé “les deux parties” à “éviter la guerre et rechercher la paix”. Il s’agit du premier voyage de la sorte pour un ancien dirigeant taïwanais.
L’Amérique latine, où la Chine a accru ses investissements, est devenue un terrain stratégique dans la bataille diplomatique qui oppose Taipei à Pékin depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949.
Taipei a dénoncé dimanche les “coercitions et intimidations” de la Chine pour lui prendre ses alliés, après l’annonce officielle à Pékin de l’établissement de relations diplomatiques entre le Honduras, l’un des pays les plus pauvres d’Amérique latine, et la Chine.
Outre le Guatemala et le Belize, Taïwan entretient toujours des relations diplomatiques avec des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, dont le Paraguay et Haïti, mais aussi avec des nations insulaires du Pacifique et le Vatican.
Avec AFP